INTRODUCTION
La fiche tactique sur la chute libre opérationnelle qui suit a été réalisée entre 1971 et 1972. Elle pose des bases de réflexions et la vision d’emploi de l’époque.
Il est, à ce jour, le document connu le plus ancien à citer l’ordre du général LE PULOCH établi le 17 juillet 1964 :
« Former des officiers, sous-officiers et hommes du rang rompus à la pratique de la chute libre et destinés à constituer en opération :
- des équipes de recherche et de renseignement ;
- des équipes de destruction et de harcèlement ;
- des équipes d’orienteur-marqueurs. »
Que peut-on en déduire ?
1. L’ordre du CEMAT est de créer une formation de « chuteurs opérationnels ».
2. Toutes les catégories de grades sont concernées.
3. L’ordre d’énumération des possibilités d’utilisation qui en découle n’est pas anodin quand on sait qu’à l’époque, dès 1963, l’EMAT pilotait directement la transformation du 13e RDP en régiment de recherche aéroportée. Ainsi, l’origine des premiers stagiaires se déduit aisément de ces trois finalités :
> La première vocation d’emploi des Chuteurs Ops désigne nommément les équipes du 13. Le stage, ouvert en 1965, répondait ainsi au besoin opérationnel du 13e RDP de disposer d’une réelle capacité de parachutage dans la profondeur du dispositif ennemi, ce qui n’était pas le cas, notamment au vu des rapports des premiers exercices Eugénie.
> La seconde désigne le mode d’action des « SAS », qui se conçoit aisément au vu de la plus-value qu’apporte la chute opérationnelle à ce type de combat sur les arrières ennemis. Hors il n'existait pas, à l'époque, d’unité spécialisée pouvant postuler à l'envoi de stagiaires sur cette finalité d’emploi.
> La troisième, enfin, désigne le mode opératoire des Pathfinders1, ces éclaireurs qui, notamment durant la Seconde Guerre mondiale, furent parachutés en tête de pont pour s'emparer et marquer les DZ tout en mettant en place des balises radio pour y guider les avions de transport. C’est à ce titre que le 2e REP envoya ses « marqueurs-jalonneurs » se faire qualifier.
Remarque sur l’Historique succinct de la fiche :
Internet permet, de nos jours, d’accéder à de nombreuses sources d’informations qu’il est aisé de recouper, ce qui n’était pas le cas à l’époque de rédaction de la fiche, d’où certaines affirmations erronées. Ainsi au point 31, l’expérimentation à l’ETAP a débuté en 1961 et non en 1962.
Au point 32 de la fiche, contrairement à ce qui est précisé, il n’y a pas eu d’expérimentation de chute opérationnelle pendant la guerre de Corée. Ni le 187e régiment parachutiste, ni les Special Forces n’ont effectué de saut à ouverture commandée. Et si la section Baker des Green Berets2 a bien parachuté des partisans Coréens sur les arrières ennemis au printemps 1953, elle le fit à basse altitude et en automatique.
Ceci étant, les pionniers sont bien les américains. Dès 1956, l’USMC, puis l’US Army en 1957, expérimentèrent la chute libre militaire (MFF)3. Suite à une recommandation écrite et à l’aide du capitaine de réserve franco-américain Jacques-André ISTEL4, l’État-major des Marines lança les essais qui permirent à la 1ère compagnie de la Force de Reconnaissance (FFRC) d’aboutir au concept HALO en 19585. De même, l’US Army mit sur pied une équipe au centre d’expérimentations de Yuma (YPG) qui, avec le soutien technique de la société de ISTEL, déboucha aussi sur la technique HALO6.
Par la suite, le premier exercice d'infiltration en chute libre en zone d’opération7 fut effectué pendant la guerre du Vietnam par l'équipe du sergent-major Billy WAUGH en octobre 1970, mais le tout premier saut HALO d'infiltration en zone hostile8 fut réalisé par l'équipe du sergent de 1re classe Melvin HILL (SOG Recon Team Florida) dans la nuit du 28 au 29 novembre 1970, à 02H00 du matin, sous la pluie et d'une hauteur de 17 000 pieds (5180 m) au dessus de la jungle Laotienne.
Notes et références :
1. Wikipedia : Military Pathfinders
2. Army SF Soldiers in Korea
3. Wikipedia : Marine Corps Test Unit #1 (MCTU #1) > Parachutist and jumpmaster training | Fleet Marine Force Reference Publication FMFRP 12-21 (pages 72, 78, 80, 84 à 85, 111 à 116, 123, 129 à 130)
4. Extrait traduit du "Skydiving Museum" : "Lors d’une visite en France en 1955, ISTEL apprit les techniques de la chute libre contrôlée qu'il rapporta aux États-Unis, mettant fin à l'époque où l'on s'agitait entre la sortie et le déploiement (du parachute)."
Remise du brevet d’Instructeur n°1 de l’école (interarmées) de chute libre militaire (MFFS) à Jacques-André ISTEL à l’occasion de son 93° anniversaire.
Le lieutenant-colonel (USMCR) ISTEL, père des Chuteurs Ops américains, est Chevalier de la Légion d’honneur (2003) pour son site « Mémoire de l’humanité » et Légionnaire d’honneur de 1re classe (2013) pour son monument dédié à l’Honneur de la Légion étrangère.
5. DefenceMediaNetwork 1st Force Reconnaissance Company (=> voir après seconde photo)
6. L’équipe d’expérimentation de l’US Army à Yuma Proving Ground (Arizona)
7. Interview du sergeant-major Billy Waugh (=> voir troisième page, colonne de droite)
8. Premier saut HALO en opération
FICHE
Fiche fournie par Gérard MOULINET n° 162
Introduction de Christophe COQUEBLIN (fils du Lcl Bernard COQUEBLIN n° 004)
Crédit photo : Military Free Fall School (MFFS)
NB : N’hésitez pas à cliquer sur les liens hypertextes des notes et références (texte en bleu ).